Article 222
Journal pour les Droits de l'Enfant
N°21 - 1 euro1er trimestre
2001
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_____________________________
Circoncision masculine, circoncision féminine
de
Sami Aldeeb, docteur en Droit, l'Harmattan, 2001.
Préface de Linda
Weil-Curiel, avocate au Barreau de Paris1
La
violence au nom du sacré, violence toujours illégitime et pourtant légitimée
par le respect de la tradition sacralisée, voilà ce que dénonce avec force
M. Aldeeb en décortiquant les textes des religions dont l'interprétation a
permis aux clercs de tous bords de sacrifier tant de victimes, impuissantes
devant le couteau.
L'un
des mérites de cet ouvrage savant est de nous éclairer sur les différentes
lectures des écritures et de montrer comment les hommes ont favorisé si
souvent le recours à la blessure pour marquer leur attachement religieux. Ce
faisant, il n'épargne aucune catégorie d'agents perpétuateurs, qui se
recrutent aussi chez les chrétiens, de la torture que constitue la pratique
de la circoncision des garçons et de l'excision voire de l'infibulation des
filles. Car tous sont responsables et coupables : ceux qui prêchent ou disent
le droit, celui ou celle qui tient l'arme qui blesse, tout comme ceux qui réclament
la coupure et qui savent la souffrance que va subir la chair pour l'avoir
eux-mêmes éprouvée. Comme si la coupure pouvait être source de bénéfice
pour l'enfant soumis de force au marquage presque toujours indélébile de son
corps, quand il n'en meurt pas.
Et
quel bénéfice la communauté des humains peut-elle tirer de cette violence ?
La pureté ?
Une
élévation spirituelle ? Allons donc ! Ce marquage des corps asservit
puisqu'il tend à enfermer les individus dans une catégorie sans leur
consentement, en violant leur intégrité physique, et leur assigne une place,
un rôle social auquel ils vont devoir se conformer.
Cette
dernière réflexion s'applique surtout à la mutilation subie par les filles
qui de ce fait deviennent des reproductrices privées de l'épanouissement
sexuel et du bien-être psychique qui l'accompagne. Outre l'indignation devant
l'agression intolérable infligée à ces enfants sans défense dans notre
société qui se veut égalitaire et laïque, c'est aussi la volonté
d'inscrire dans les faits par des décisions de Justice que la loi de la République
ne saurait tolérer de distinction dans la protection qu'elle garantit aux
enfants, quelle que soit la couleur de leur peau et quelles que soient les
convictions de leurs parents, qui a motivé mon engagement dans le combat
contre les mutilations sexuelles pratiquées en France.
J'admets
que jusqu'à présent ce combat personnel s'est cantonné aux mutilations
sexuelles féminines, qui me sont apparues plus drastiques que la
circoncision, même si je désapprouve totalement la circoncision des garçons.
Or, j'ai appris par cet ouvrage que des formes de circoncision masculine tout
aussi pénalisantes étaient pratiquées, ce qui renforce ma conviction qu'il
faut s'employer à éliminer toutes ces agressions auxquelles des adultes
soumettent le corps des enfants.
Est-il
un espoir de voir disparaître ces pratiques attentatoires à la dignité
humaine alors que les sociétés se fondent et se réfugient dans leurs rites
? Pourquoi pas si la raison et la bienveillance prennent le pas sur la
superstition et les élucubrations, en laissant parler notre voix intérieure
qui dicte d'ouvrir son cœur plutôt que d'abîmer.
C'est
la leçon que j'ai retenue de ce magistral ouvrage.
1
Maître
Linda Weil-Curiel a plaidé les procès engagés en France contre la
circoncision féminine.
Elle
lutte dans le cadre de la Commission
pour l'abolition des mutilations sexuelles
(note de l'auteur).
Revue
de Presse
Les Maliens
couperont-ils à la prison ?
Le
lundi 13 février, 5 Maliens, - un couple, un homme et ses 2 épouses - devaient
être jugés par la cour d'assises de Seine-Saint-Denis pour avoir fait exciser
leurs 7 filles entre 1985 et 1989 à Noisy-le-Grand. Peine encourue : 20 ans de
réclusion criminelle pour "complicité de coups et blessures volontaires
par ascendant légitime sur mineure ayant entraîné une mutilation
permanente", l'exciseuse proprement dite n'ayant pas été retrouvée. Les
2 maris, Mahmadou Diawara et Sékou Wague, ont déclaré que cette opération
(ablation du clitoris chez les jeunes filles) était une affaire de femmes et
qu'ils ignoraient son interdiction en France. C'est curieux comme certains
immigrés connaissent bien le droit social (droit de grève, régime des
prestations sociales) et mal le code pénal. Les femmes en question, les 2 épouses
de Diawara et celle de Wague, ont reconnu avoir emmené leur progéniture chez
l'exciseuse mais ont refusé de donner l'identité de cette tortionnaire (sûrement
sans papiers).
Tout
ce beau monde était poursuivi par la Ligue du droit international des femmes,
le GAMS (Groupe pour l'abolition des mutilations sexuelles) et SOS femmes
alternatives. Le verdict devait être rendu le mercredi 15 février. Personne ne
s'attendait à des miracles : en 1998, la cour d'assises de Paris n'avait
condamné qu'à 8 ans de prison une exciseuse professionnelle (reconnue coupable
d'avoir mutilé 48 gamines). Alors, les parents, on se doute bien qu'ils
n'auraient pas écopé de grand-chose. Mais quand même, pour le principe, on
espérait une peine d'emprisonnement. C'était compter sans la justice française,
jamais en panne d'idées lorsqu'il s'agit d'accorder un sursis aux affreux ou même
de les blanchir. Ainsi, le mardi 14 février, la présidente de la cour a dû
ordonner le renvoi du procès parce que les avocats des Maliens refusaient de
visionner un document vidéo montrant une excision. La projection de cette
cassette avait été demandée par les avocates de la partie civile "à
titre pédagogique". Commis d'office suite aux retraits des avocats de la défense,
le substitut du bâtonnier a finalement obtenu le renvoi du procès en invoquant
sa méconnaissance du dossier.
Il y
a quand même eu une journée d'audience : le lundi 13 février. Une journée
instructive. Qui aurait dû faire la une de tous les journaux (surtout télévisés
car il y avait du spectacle). Un psychiatre était venu dédouaner les Maliens
en expliquant que ces paysans
analphabètes "n'ont pas résisté aux impératifs de comportement de leur
culture, de leur village". Leur choix n'est pas dicté par une volonté
d'action, avait expliqué l'émule de Freud, mais édicté par "des impératifs
culturels". En fait, les victimes, c'est eux, n'est-ce pas docteur ? Les
avocates de la partie civile, craignant que les jurés ne sachent pas exactement
à quoi correspond cet "impératif culturel" du genre sanguinolent,
avaient alors exigé le visionnage de la cassette. "C'est une lâcheté de
ne pas vouloir affronter les faits dont on est en train de débattre",
avait plaidé Me Linda Weil-Curiel.
L'excision
concerne 130 millions de femmes dans le monde. Elle est pratiquée dans 28 pays
africains, ainsi que dans certains états du Moyen-Orient et d'Asie. Selon
l'ONU, 6000 fillettes de 4 à 12 ans sont excisées tous les jours. Surtout en
Afrique sub-saharienne où 2 millions de prénubiles subissent chaque année
cette mutilation rituelle. Dans les pays où la législation est inexistante
dans ce domaine, comme la Somalie, le Sierra-Léone et le Mali (un de nos plus
gros fournisseurs d'immigrés), le taux de femmes excisées dépasse 90 %.
L'excision est non seulement une blessure atroce mais elle est la source de
nombreuses complications médicales : décès lors d'accouchements, mauvaise
cicatrisation, rétention urinaire. En outre, les exciseuses, à côté de qui
les ouvriers de nos abattoirs sont des délicats efféminés, utilisent le même
outil de travail - couteaux ou lames de rasoir -, dans des conditions d'hygiène
que vous pouvez imaginer et sur plusieurs dizaines de fillettes (car l'opération
se fait à la chaîne).
Ce
qui plaît beaucoup à Monsieur HIV, alias SIDA, qui a trouvé chez ces
Africains traditionalistes des hôtes accueillants.
Minute
Hebdo - 22/03/00
Le défenseur des enfants, Claire Brisset, remet son 1er rapport officiel.
5
mois seulement d'activité, aucune campagne de publicité, et déjà 600
courriers. Le défenseur des enfants, Claire Brisset, a remis au président de
la République, lundi 20 novembre (journée nationale, et désormais européenne,
des droits de l'enfant), son 1er rapport. Instituée par la loi du 6 mars 2000,
sur le modèle du médiateur de la République, cette nouvelle autorité
administrative indépendante chargée de défendre les droits de l'enfant tels
qu'ils ont été définis par la loi ou les conventions internationales dresse
un constat plutôt rude : "Dans notre société, qui n'a ni l'excuse de la
guerre ni celle de la pauvreté généralisée, la voix des enfants n'est guère
entendue."
De la
France entière, lui sont donc parvenus 600 courriers rédigés à 37% par des mères,
à 21% par des pères, à 16% par les enfants eux-mêmes (principalement des
plus de 13 ans). Les associations de défense des enfants n'ont adressé que 5%
des requêtes. Dans 21% des cas, il s'agissait d'autres interlocuteurs, surtout
des grands-parents (12%). Dans 62% des cas, les lettres alertent Claire Brisset
sur les conséquences, pour les enfants, du divorce ou de la séparation de
leurs parents, réclamant une remise en cause des modalités de garde prévues ;
les allégations de maltraitances physiques ou de violences sexuelles, qui
seraient le fait de l'autre parent ou
de son nouveau compagnon, sont légion. Parmi les autres cas soumis, 19%
concernent des allégations de maltraitances physiques, psychologiques ou de
violences sexuelles, ainsi que des contestations de décisions de placement
judiciaire.
Les
violences institutionnelles alimentent 15% des plaintes, tandis que la question
des mineurs étrangers isolés vise 4% des cas. Le défenseur des enfants
formule une série de propositions pour s'attaquer aux
"dysfonctionnements" constatés. Elle suggère de rendre plus effectif
l'accès au droit pour les enfants, qui "ont trop rarement l'occasion
d'exprimer leurs souhaits en matière de vie familiale". Aussi préconise-t-elle
d'augmenter le nombre de juges des enfants et de greffiers, de développer la
mise à disposition de services d'accès au droit, et d'améliorer le dispositif
d'aide juridictionnelle pour les mineurs.
Autre
recommandation : permettre aux familles d'avoir accès à leur dossier
d'assistance éducative. "Les familles lors de la 1ère audience chez le
juge, se trouvent couramment dans l'ignorance des motifs pour lesquels il a été
saisi, explique Claire Brisset. Lors de la procédure, ils ne connaissent pas
non plus le contenu de leur dossier." Seul leur avocat a le droit de le
consulter. Mais un tel recours à un avocat est "peu fréquent". Une réforme
s'impose d'autant plus, selon Mme Brisset, que la France a été condamnée par
la Cour européenne des droits de l'homme sur ce sujet.
En
cas de placement de très jeunes enfants, le défenseur souhaite l'instauration
d'une procédure de référé devant le 1er président de la cour d'appel,
puisque la procédure d'appel classique s'avère trop longue. Elle prône encore
une accélération de l'application de la loi du 17 juin 1998 sur les
infractions sexuelles ; une prise en compte des mineurs étrangers isolés comme
mineurs en danger ; et un meilleur accès au logement des mères séropositives
ou malades du sida (ouverture d'appartements thérapeutiques).
En
2001, le défenseur des enfants a d'ores et déjà prévu d'alerter les pouvoirs
publics sur les "insuffisances" de la psychiatrie de l'enfant. Dans le
pays d'Europe qui connaît le plus fort taux de suicide chez les 15-24 ans, 17 départements
sont dépourvus de lits de psychiatrie infanto-juvénile et "les secteurs
de psychiatrie infanto-juvénile, qui suivent chacun, en moyenne, 1183 patients,
disposent en moyenne de moins de 6 postes de psychiatres à temps plein".
Le
Monde - 22/11/00
Les ministres
européens chargés de l'enfance réunis pour la 1ère fois.
Pour
la 1ère fois, lundi 20 novembre, les ministres européens en charge de
l'enfance se sont réunis. Profitant de la présidence française de l'Union
européenne, Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille et à
l'enfance, a lancé à Paris "l'Europe de l'enfance".(...). A l'issue
de cette rencontre, les ministres devaient présenter un "plan commun
d'action" prévoyant notamment la création d'un observatoire européen de
l'enfance et de la famille, le développement commun d'outils de prévention
contre la pédophilie, la mise en place d'un numéro d'appel commun pour
l'enfance maltraitée, l'élaboration d'un code éthique européen contre les
images violentes et dégradantes, une coopération pour mieux traiter du problème
des mineurs étrangers isolés, l'intensification de la lutte contre le tourisme
sexuel... La rencontre devait enfin permettre de préparer le sommet mondial des
enfants de septembre 2001, à l'ONU, afin que l'Europe s'y exprime d'une même
voix, et réclame ainsi avec davantage de force la mobilisation d'une large part
des efforts budgétaires de coopération au profit de l'éducation, la réduction
des inégalités entre filles et garçons dans l'accès à l'éducation et
l'interdiction des mutilations sexuelles.
Le
Monde - 21/11/00
La circoncision : une mutilation
totalement inutile.
La
circoncision consiste en l'amputation du prépuce, la peau qui entoure le gland.
Ce rituel, présent dans de nombreuses régions du monde, est pratiqué à des
fins purement religieuses, soit après la naissance, soit vers l'âge de 7-8
ans. Les religions ne faisant plus forcement recette, ses avocats vantent ses
vertus hygiénistes : elle éviterait les infections. Une explication qui n' a
plus de raison d'être, aujourd'hui, en Europe. Qui ne se douche au moins une
fois par jour ?
De
toute façon, ce dernier sécrète son propre sébum protecteur. Hormis les cas
où le prépuce n'arrive pas à se rétracter (encore que dans 9 cas sur 10, un
décalottage progressif résout le problème), la circoncision devrait être
interdite en France, au même titre que l'excision. Car tout comme cette dernière,
elle raréfie l'intensité du plaisir. la peau du gland devenant plus épaisse,
à l'égal du corps de la verge, sa sensibilité s'en trouve diminuée. Au
risque de choquer certains, appelons un chat un chat : la circoncision est une
mutilation. Il existe pire, bien sûr : la subincision, qui consiste à inciser
le pénis sur toute sa longueur pour laisser l'urètre ouvert. Les femmes ont
bien su dénoncer la pratique de l'excision. Qu'attendons-nous, nous les hommes,
pour faire de même ?
M
Magazine - 01/01
Douleur de
l'enfant : une reconnaissance tardive.
La
douleur chez l'enfant a longtemps été sous-évaluée, voire ignorée, par le
corps médical.
Or
non seulement le nourrisson possède les capacités neurophysiologiques pour
acheminer les messages douloureux au cerveau, mais ses réactions à une
stimulation douloureuse sont plus intenses que celles des adultes !
De
plus, les expériences douloureuses répétées peuvent laisser une trace
durable chez l'enfant.
La
circoncision est l'opération chirurgicale la plus pratiquée aux Etats-Unis.
Elle concerne 1,2 million de nouveau-nés chaque année (de 60 à 80% selon les
régions). La majorité de ces enfants ne bénéficie d'aucun moyen antalgique
ou anesthésique. En Europe, la même intervention pratiquée plus tardivement
est en revanche reconnue comme particulièrement douloureuse ; réalisée en
chirurgie ambulatoire elle est, avec l'ablation des amygdales, l'opération dont
la douleur reste la plus difficile à soulager au domicile. Cette situation est
paradoxale au regard des standards éthiques exigés pour l'expérimentation
animale. En effet, la même intervention, provoquant une stimulation nociceptive
majeure (la nociception est définie comme une stimulation menaçant l'intégrité
du corps) au tout début de la vie, ne pourrait jamais être pratiquée sur un
animal non anesthésié, ni même envisagée dans un laboratoire de recherche!
(...)
Ann Taddio, pédiatre à Toronto a évalué chez 87 nourrissons de 4 à 6 mois
la douleur lors de la 1ère vaccination. Les enfants étaient répartis en 3
groupes, le 1er ayant été circoncis sans anesthésie, le second l'ayant été
avec une crème contenant un anesthésique local, le dernier n'ayant pas été
circoncis (Lancet, 349, 1997). Les "indicateurs" de la douleur éprouvée
du 1er groupe (sans anesthésie) sont significativement plus hauts que ceux du 3ème,
ceux du second étant situés entre les deux. Cette étude suggère l'existence
d'une forme de "mémoire" de la douleur. Autrement dit, le système
nerveux central du nouveau-né exposé à une stimulation nociceptive majeure
est capable plusieurs mois après l'événement douloureux d'en garder et d'en
manifester la trace.
(...)
Cette nouvelle représentation de la douleur s'oppose à la traditionnelle
valorisation culturelle qu'on retrouve dans l'Ancien Testament : "Qui aime
son fils lui prodigue le fouet" (l'Ecclésiaste,
30, I). Pendant longtemps, les vertus pédagogiques de la douleur infligée lors
des châtiments corporels ont été recommandés et codifiées par l'institution
scolaire. La douleur devait permettre à l'enfant de se forger le caractère
pour mieux l'aider à affronter le "buisson d'épines" de la vie. Le
fouet, la férule, le martinet, les coups de ceinture ont longtemps représenté
des outils éducatifs essentiels dans nos sociétés. N'oublions pas qu'à l'échelle
de la planète, la douleur infligée aux enfants demeure la méthode éducative
la plus répandue. Certes, il existe des douleurs utiles à l'enfant. Les maux
quotidiens (bosses, coups, petites brûlures...) lui sont nécessaires pour
apprendre et intégrer les limites de son corps et de son environnement, ainsi
que pour structurer son schéma corporel. En revanche, les douleurs de la
maladie, celles provoquées par une opération ou une lombaire n'ont jamais été
une étape nécessaire vers la maturité!
Dr
Annequin - La Recherche - 11/00
Pratiques de la circoncision.
La
circoncision pratiquée pour des motifs non religieux a débuté aux États-Unis
à la fin du XIXe siècle dans un cadre strictement médical. Cette opération
était justifiée par la théorie des effets néfastes du prépuce, dont le père
fondateur est le professeur Lewis Sayre, éminent chirurgien new-yorkais, président
de l'American Medical Association. En 1870, il fit cette "découverte"
en voyant marcher miraculeusement un enfant de 5 ans, dont l'usage des jambes était
auparavant impossible, juste après avoir subi une circoncision pour soulager un
para-phimosis sévère (étranglement du gland par un prépuce rétréci). Après
d'autres observations similaires, il en théorisa massivement les bénéfices
universels : "Beaucoup de cas d'enfants irritables, présentant un sommeil
agité, une mauvaise digestion, qui sont souvent attribués aux vers, sont
uniquement dus à une irritation du système nerveux causée par un prépuce adhérent
ou rétréci." L'Angleterre, également touchée par cette lubie, en arrêta
la pratique à partir de 1949, quand Douglas Gairdner, pédiatre de Cambridge,
publia un article réhabilitant les fonctions du prépuce et, surtout, présentant
les chiffres de la mortalité due à la circoncision : 16 décès chaque année
chez des enfants âgés de 0 à 5 ans. Des débats réguliers se sont développés
au sein des revues médicales internationales. L'Académie américaine de pédiatrie
a répété à 3 reprises (en 1971, 1975, 1983) qu'il n'y avait aucune raison médicale
justifiant une circoncision systématique, mais, en 1989 et sous la pression des
militants pro-circoncision, il fut pourtant rajouté qu'il existait des bénéfices
préventifs sur les infections urinaires et les maladies sexuellement
transmissibles. Ce n'est finalement qu'en mars 1999 qu'une déclaration de 5
pages a conclu qu'il n'existait pas d'arguments pour justifier cette pratique
systématique et qu'une analgésie devait être procurée à l'enfant si
l'intervention était néanmoins réalisée. L'ablation des amygdales représente
le même type de chirurgie de masse, longtemps réalisée sur des indications
tout aussi fantaisistes ; elle a été également pratiquée, sans beaucoup
d'anesthésie, sur des générations d'enfants. Il semble que la section du
frein de langue soit un équivalent japonais actuel de cette chirurgie rituelle
et laïque.
Dr
Annequin - La Recherche - 11/00
Objets de science.
Admettons
que les scientifiques soient des êtres humains, on pourrait alors penser qu'ils
sont mus par leur inconscient. Bien sûr, les affects ne sont pas décrits dans
les protocoles expérimentaux. Quel chercheur osera avouer qu'il s'est lancé à
corps perdu dans l'évaluation de l'effet stabilisateur de l'humeur par les sels de lithium, parce que sa mère qu'il
aimait tant souffrait de maladie maniaco-dépressive ? Si ce
"contre-transfert de l'objet de science" concerne la molécule de
lithium, comment voulez-vous rester de marbre quand on cherche à démontrer les
mécanismes de la maltraitance envers un enfant ? L'objet de science
"enfant maltraité" nous submerge tellement qu'on perd toute mesure.
Dans
les années 1960, il était pratiquement impossible de simplement dire qu'on
avait eu à soigner des enfants maltraités. Les hématomes sous-duraux (entre
la méninge et le crâne) étaient opérés sans mot dire. Les fractures à répétition
chez un enfant dénutri étaient attribué à la malchance. Quant à la
maltraitance sexuelle, elle était tellement impensable que ceux qui cherchaient
à en témoigner étaient souvent accusés d'en faire la publicité. "Nous
n'avons jamais vu de tels cas", disaient les académiciens quand de jeunes
médecins soulevaient le problème. Effectivement, ils n'en avaient jamais vu,
puisque le "contre-transfert de l'objet de science" les angoissait
tellement en provoquant en eux une représentation si insupportable qu'ils
s'arrangeaient pour dénier la réalité choquante et faire taire les témoins,
victimes et cliniciens. Ne croyez pas que ce mécanisme psychologique énorme et
naïf soit rare. Il a fallu une poignée de militants de la cause des enfants, médecins,
psychologues et non-diplômés, pour lancer un mouvement d'idées qui est entré
dans la culture et permet aujourd'hui la protection de 300 000 enfants !
Mais
puisqu'il est difficile d'observer des enfants comme des objets de science qui
ne nous affecteraient pas, certains soigneurs se jettent sur les enfants
maltraités avec une violence affective, un désir de les aider qui les
maltraite une 2ème fois. Je me rappelle cette "équipe soignante" qui
avait demandé à des enfants incroyablement maltraités de monter sur une
estrade pour raconter leurs souffrances. Après la séance, les adultes
bouleversés et passionnés discutaient savamment entre eux pour découvrir
quelques moyens de combattre ces horreurs. Les enfants, seuls dans un coin, sans
défense, se sentaient humiliés une fois de plus. Ce genre de bienveillance
meurtrière se répétant souvent, certains chercheurs ont tenté d'en faire une
analyse froide, comportementale et psychologique, la plus scientifique possible
("Faits et méfaits de la psychologie chez l'enfant victime d'abus
sexuel", Journal du Droit des Jeunes, n°190). Ils ont aussitôt été accusés
de négationnisme, de "Faurisson de la maltraitance" et de complicité
de crime : "Silence, on viole".
La démarche
scientifique permet parfois de rendre visible l'invisible, à condition que les
chercheurs acceptent d'ouvrir les yeux, non seulement
sur l'objet de science mais sur l'effet que cet objet provoque au fond
d'eux-mêmes.
Boris
Cyrulnik - La Recherche - 11/00
Un enfant mutilé
dans un fast-food.
Un
homme a sectionné avec une paire de ciseaux le sexe d'un enfant de 5 ans, dans
les toilettes du McDonald's du centre commercial des Trois Fontaines, à Cergy
(Val d'Oise). L'agression a eu lieu hier vers 19h30, alors que le restaurant était
bondé. L'enfant était accompagné de sa nourrice, qui l'a laissé quelques
instants seul dans les toilettes pour hommes. L'agresseur, âgé d'une trentaine
d'années, a profité de son absence pour mutiler le petit garçon. Il a ensuite
tenté de s'enfuir mais il a été rattrapé dans la galerie marchande par
plusieurs clients, agents de sécurité et employés du restaurant, lancés à
ses trousses. Les policiers l'ont placé en garde à vue. L'enfant a été
transporté par les pompiers au service des urgences de l'hôpital Robert Debré,
à Paris. Il devait subir une greffe dans la soirée.
Le
Parisien - 29/12/00
Israël : la Cour
suprême accorde à tout médecin reconnu
le droit de
pratiquer la circoncision.
Statuant
sur la requête de la clinique "Mila Tova" - un établissement privé
spécialisé dans les circoncisions - qui voulait remettre en cause le refus du
ministère de la Santé et de celui des Cultes de faire figurer des docteurs sur
sa liste des Mohalim (ceux qui pratiquent la "Mila"), la Cour suprême
a pris une fois de plus ses options pro-laïques : les juges ont en effet
autorisé tout médecin agréé par les hôpitaux à pratiquer la Brit-Mila au même
titre que les rabbins spécialisés dans ce domaine. Un arrêt qui a provoqué
la colère des mohalim traditionnels - une profession qui est de plus en plus
menacée en Israël par cette tendance à la médicalisation de la circoncision.
Et ce, même si un Mohel ne touche que 500 shékels pour une mila, alors qu'un médecin
demande au moins 2000 shékels.
Actualité
Juive - 18/01/01
Circoncision
: documentaire sur Arte jeudi 8 mars 2001 à 20h45.
Pour
commémorer la Journée internationale des femmes, la chaine franco-allemande a
diffusé un reportage sur la circoncision de Nurith Aviv, réalisatrice israélienne.
60 minutes de témoignages de couples mixtes confrontés à ce dilemme : couper
ou non le prépuce de bébé ?
Ce
programme a obtenu 7,5 % de part de marché, soit en audience 3,3 millions de téléspectateurs.
AME -
09/03/01
Double vie
: roman de Pierre Assouline.
Force était de reconnaître que le
membre était saigné à vif, d'une manière si régulière dans la circularité
qu'un stomatologiste eût pu révéler des empreintes. Ce n'était pas des
traces mais des preuves. Elle ne voulut pas y croire. Son premier réflexe fut
de dédramatiser l'accident
en invoquant un addenda à sa circoncision. Mais quand il l'invita à
constater les dégâts, elle ne put s'empêcher de partir dans un éclat de rire
inextinguible.
(...) «Je ne voudrais pas me mêler de votre
vie privée, chacun ses mœurs, mais vous devriez être plus prudent. Internet, shtetl planétaire, très bien. Mais
tous ces sites sur les verges un peu bizarres, dans une
maison comme la nôtre, ça fait désordre. Évitez-les à l'avenir, les
gueules cassées du phallus, du moins dans le cadre du travail. Imaginez
que quelqu'un de... disons... maladroit appuie sur la touche Imprimer et que ce soit
diffusé dans les services avec votre nom de demandeur, hein ? Vous devriez
peut-être prendre quelques jours de repos. Ce que j'en dis, c'est surtout pour
vous, votre image ici.»
éditions Gallimard, 12/00.
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Avez-vous
été victime d'une circoncision avant 18 ans ?
Vous
pouvez porter plainte contre votre circonciseur.
Contactez-nous : www.enfant.org
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